La Wrangleret le Defender ont plein de choses en commun. Ce sont des icônes pas seulement du monde du 4x4, mais de l'histoire automobile tout entière. Leurs racines remontent aux années 40 et leurs apparences sont restées très proche de celles des origines. Ce sont deux des derniers vrais 4x4 aux capacités de franchissement presque sans limites. Ce sont deux engins qui conservent délibérément un côté rustique et authentique. Enfin ce sont deux véhicules qui viennent de recevoir une mise à jour mécanique fin 2011.
Charisme
C'est toujours avec une émotion certaine qu'un journaliste va prendre les clés d'une Wrangler ou d'un Defender pour une semaine. Parce qu'il sait que durant les sept prochains jours, il va vivre quelque chose qui tranche radicalement avec les sensations trop souvent lissées, aseptisées que l'on éprouve dans les voitures – ou SUV – modernes. Conduire une de ces deux machines, c'est un retour à l'essentiel. Bien sûr l'une comme l'autre ont su profiter des avancées technologiques, mais de manière plus sélective, sans se laisser envahir. Pour donner le meilleur, ces engins demandent de la part du conducteur un minimum d'implication, oserais-je dire de talent, sans quoi leur caractère rugueux reprend le dessus et transforme un trajet même sur une route parfaitement asphaltée en un sommet d'inconfort. Au volant d'une Wrangler ou d'un Defender, on n'a pas le droit d'être un conducteur-robot. Et c'est probablement ça, en plus de leur aura historique, qui leur donne tant de charisme.
Le confort, c'est relatif
Que dire de leur look ? Les formes sont connues depuis si longtemps qu'elles font partie de l'inconscient collectif. On dira par exemple que, par goût esthétique et parce qu'il a deux enfants, votre serviteur préfère les versions longues dans les deux cas, nommées Unlimited pour la Jeep (L: 4.75m l:1,87m H: 1,80m), 110 pour le Defender (L: 4,74m l: 1,79m H 2,01m). On notera aussi que la plus "actuelle" des deux machines est la Wrangler, née en 2006, époque à laquelle est apparue la version longue. Le Defender n'a, à quelques menus détails près, pas changé depuis… 1971.
C'est aussi ce qui explique que l'habitacle de la Jeep soit plus confortable.S'il ne se focalise pas trop sur la (respectable) qualité perçue, l'automobiliste de 2012 ne se sentira pas trop dépaysé dans la Jeep.
Dans le Defender par contre, l'ambiance reste toujours dépouillée, malgré les vitres électriques, le lecteur CD et la climatisation intégrés à la planche de bord renouvelée en 2007. Mais les commandes de phares, d'essuie-glace (target=undefined), de ventilation sentent toujours les années 80. Quant à l'espace à bord, il renvoie plus loin encore: on a l'épaule contre la vitre, pas de rebord pour y poser le coude, et pas de repose-pied à gauche de l'embrayage. Dans un Defender, faut pas être précieux…
Moteurs
Ces deux icônes ont reçu il y a peu des mises à jour mécaniques. Dans le cas de la Jeep, c'est en effet une "simple" mise à jour puisque son 4 cylindres 2.8 turbo diesel passe de 177 à 200 ch, à 3.600 tours au lieu de 3.800. Le couple passe de 400 à 410 Nm et sa disponibilité est élargie, de 2.000 à 3.200 tours (2.600 auparavant). Le plus beau, c'est que grâce à quelques retouches et à l'adoption d'un Stop&Start (en série avec boîte manuelle 6, non livrable avec boîte auto 5), la consommation chute de 2,5 litres, avec une moyenne annoncée de 7,4 l/100 km pour 194 g CO2/km (boîte auto: 8,3 l et 217 g). Dans ce domaine, le Defender confirme qu'il est toujours le plus "à l'ancienne" des deux. On vient pourtant de lui greffer l'un des diesels les plus modernes du marché: le 4 cylindres 2.2 PSA/Ford, que l'on retrouve aujourd'hui chez Peugeot (508 et 4008), Citroën (C5 et C-Crosser), Ford (Mondeo, S-Max, Galaxy) et Land Rover bien sûr (Freelander, Range Rover Evoque). Mais malgré cela, les cotes du Defender 110 sont pareilles qu'avec feu le 2.4: 11,1 l/100km, 295 g CO2/km, 122 ch et 360 Nm. La différence est que le 2.2 est Euro5 alors que le 2.4 ne l'était pas. Et aussi que le niveau sonore est sensiblement inférieur.
Sur route
Avec ce nouveau 2.2, le Defender est en effet moins bruyant. Mécaniquement du moins, car rien n'a changé au niveau des bruits aérodynamiques et de roulements. Les niveaux sont acceptables, mais n'ont pas progressé. Si la mise en mouvement est donc un peu moins "rêche", la conduite générale reste assez virile: la commande de boîte est précise mais les verrouillages sont fermes, mais c'est surtout la direction et l'immense rayon de braquage qui demandent une certaine habitude, sous peine de devoir manœuvrer dans un rond-point un peu étroit. L'amortissement par contre, bien que digne d'un véhicule que rien n'arrête en hors-piste, est loin d'être aussi rude qu'on l'imagine. Enfin les sièges sont extrêmement confortables et atténuent aisément les imperfections du revêtement que les suspensions n'auraient pas géré.
A côté du Defender, la Wrangler est une Rolls. Le plus gros moteur se fait moins entendre, l'insonorisation aux bruits parasites est plus efficace, les sièges sont tout aussi confortables et l'amortissement est plus à l'américaine. Bien sûr ni la Jeep ni le Land ne sont dédié au sprint ou à l'attaque de courbe, la question des performances est donc sans objet. Mais bref, la Wrangler est très largement plus confortable que le Defender. Préfère-t-on pour autant la Wrangler? Pas forcément. Car finalement, la Jeep n'est vraiment sensationnelle que lorsqu'on s'attaque à des terrains hostiles. Dans le Defender, chaque trajet est un évènement, qu'il y ait une route ou non. Bien sûr femme et enfants ne sont pas forcés d'apprécier autant la chose que le conducteur. Le Land Rover est donc un engin plus extraordinaire, mais aussi un choix plus égoïste.
Hors route
Nous avons ici deux 4x4 à l'ancienne, comprenez qu'ils présentent tous deux un second levier sur le tunnel central. Dans la Jeep, il sert à passer de 2 à 4 roues motrices, puis en 4 roues motrices avec boîte courte. Un véritable verrouillage de différentiel mécanique est disponible en option, mais sans cela, l'ESP configuré tout-terrain fait déjà de l'excellent travail. Pour avoir essayé la Wrangler lors de sa sortie en 2006 dans une forêt de l'Etat de Washington, je peux vous garantir qu'elle est absolument redoutable.
Je n'ai par contre jamais eu le bonheur d'utiliser un Defender en tout-terrain, mais qui doutera de ses capacités? Le Defender dispose d'une transmission intégrale permanente. Son second levier sert donc à passer en boîte courte et à verrouiller les différentiels mécaniques, livrés ici en série. Voilà ce que nous appelons se montrer sélectif avec la technologie.
Ecologique?
Et nous voici à l'explication de titre. Les 4x4 sont trop souvent montrés du doigt comme des véhicule coupables de détruire la planète. Pourtant, une étude publiée en 2006 par CNWMR, une agence de recherche et de marketing indépendante qui observe le monde automobile depuis plus de 20 ans, a classé la Jeep Wrangler comme étant (beaucoup) plus propre qu'une Toyota Prius. Un résultat qui fit le buzz et suscita des débats acharnés entre les pour et les contre. Cette étude prenait en compte l'empreinte écologique totale des véhicules, de la conception au recyclage, en passant par la fabrication de la voiture (et de ses éléments achetés à des sous-traitants), son transport vers les marchés où elle est vendue, son utilisation effective, sa durée de vie potentielle avant d'être obsolète, etc., etc. Si l'on prend tout cela en compte, la voiture ayant le plus faible impact environnemental est la Smart. La Jeep Wrangler est 4ème du classement, avec un postulat qui tient la route: une Jeep n'aura pas coûté énormément d'énergie à concevoir puisqu'elle repose principalement sur des technologies éprouvées de longue date, ni à fabriquer puisque ses formes sont simples et son habillage intérieur relativement rudimentaire, ni à transporter puisqu'elle est très majoritairement vendue là où elle est produite (aux USA), ni à recycler puisqu'elle comporte plutôt moins d'éléments qu'une automobile classique, et surtout rien d'aussi complexe que, par exemple, des batteries au nickel. Et tout cela compense, semble-t-il, sa consommation et ses émissions plus élevées. Le Defender n'est pas repris dans l'étude, mais on peut raisonnablement penser que ses coûts énergétiques sont très similaires. Et le Defender a un argument de plus, car saviez-vous que tous les Land Rover (et Range Rover) achetés neufs profitent d'une compensation carbone, inclue dans le prix d'achat, couvrant les 75.000 premiers kilomètres? Alors, c'est qui le pollueur?