Les marques nationales ont en effet pris tout leur temps pour se lancer dans cette nouvelle technologie, alors que chez les Japonais, Toyota présente aujourd’hui la troisième génération de la Prius, la pionnière des hybrides, et avec la Lexus LS, la technologie a également fait son entrée l’année dernière dans la catégorie supérieure. La question brûle toutes les lèvres: pourquoi avoir attendu si longtemps ? Les concepteurs n’assouviront pas notre curiosité. Soit. Une seule chose compte désormais: l’hybride allemande est enfin arrivée. Et sous les traits du vaisseau amiral de l’artiste automobile de Stuttgart, s’il vous plaît. Dans un premier temps, Mercedes greffera un second cœur à la Classe S et mettra la S400 BlueHybrid sur le marché à partir d’avril 2009, à un prix encore inconnu à ce jour.
Base renforcée
L’hybride est en fait une dérivée de la S350. En marge d’une multitude de nouveautés dans les composants, le V6 essence de 3,5 litres lui-même a été revu et corrigé. À ce titre, des modifications ont été apportées, entre autres, à la culasse du cylindre, au piston, à l’arbre à cames et à la commande des soupapes. Le point de fonctionnement a également été déplacé afin d’améliorer la rentabilité. Cette optimisation du moteur thermique procure à elle seule une réduction de la consommation et une légère augmentation de la puissance, qui atteint 279 CV.
Le six cylindres ainsi remodelé sera-t-il aussi implanté dans les modèles essence traditionnels ? Non. Mercedes a dû sacrifier quelque peu le comportement de marche pour obtenir cette efficacité accrue et ses clients ne sont pas prêts à en payer le prix. Comment cela se traduit-il dans l’hybride ? En pratique, les composants du module hybride font fonction de masses d’équilibrage, qui rétablissent la régularité du fonctionnement du moteur.
Innovations
Au rayon des nouveautés, le compartiment du moteur abrite désormais un moteur électrique à aimant permanent, un système électronique de puissance et de régulation, un transformateur de tension et- tenez-vous bien- une batterie lithium-ion haute tension. À cet égard, Daimler fait réellement figure de précurseur, puisque les véhicules hybrides sont encore équipés jusqu’à présent de batteries nickel-hydrure métallique, mais celles-ci sont plus lourdes et moins performantes. Enfin, pour que l’accumulateur d’énergie soit aux petits soins, il est intégré dans le circuit de refroidissement de la berline et il se situe donc en permanence à une température de fonctionnement optimale de 20 à 35 degrés Celsius.
Dans un souci de gain de place, le moteur électrique en forme de disque, réalisé par Continental, est logé dans le boîtier du transformateur entre le moteur et la transmission automatique à sept rapports de série. Ce moteur remplit essentiellement trois fonctions : il remplace le démarreur et l’alternateur, il soutient le moteur thermique, et en tant que générateur, il fournit un courant à la batterie. Cette batterie est à son tour connectée au réseau embarqué 12 volts et alimente les équipements standard tels que les phares, par exemple.
Rien à signaler
Lorsque le conducteur actionne la clé de contact, le moteur électrique sort de sa léthargie. À une tension de fonctionnement de 120 volts, il offre une puissance de 20 CV et un couple de 160 newtons-mètres. Le tout dès le démarrage, à la différence d’un moteur thermique. Le groupe électrique met l’essence en marche et l’injection de carburant ne commence qu’à un peu plus de 500 tours. L’opération se déroule en quelques fractions de seconde, sans que le conducteur ne remarque quoi que ce soit. Seule la petite indication « Ready » sur le tableau de bord lui signale que les moteurs thermique et électrique sont prêts.
Le système Start/Stop automatique fonctionne d’ailleurs selon le même principe. Lorsque le conducteur appuie sur le frein jusqu’à s’immobiliser, à un feu rouge, par exemple, le moteur thermique s’arrête à partir d’environ 15 km/h. Ensuite, dès qu’il relâche le frein, le moteur électrique allume à nouveau le moteur essence et le trajet peut se poursuivre.
En effet, la Classe S ne peut rouler exclusivement à l’électricité, le groupe électrique n’étant qu’une aide au moteur essence. Cumulés, les deux systèmes transmettent une puissance de 299 CV et 385 newtons-mètres aux roues arrière. La Mercedes ne nécessite ainsi que 7,2 secondes pour se hisser à 100 km/h, départ arrêté, et grâce à son couple constant, elle affiche une accélération nettement plus puissante à partir des bas régimes. La S400 BlueHybrid réagit en outre plus directement aux commandes d’accélération et paraît plus agressive dans les poussées intermédiaires et les dépassements. En roue libre et au freinage, le moteur électrique joue par contre un rôle de générateur, qui charge la batterie et alimente ainsi l’électronique de bord sans dépense d’énergie supplémentaire.
Utile dans le trafic urbain
Les hybrides ne peuvent hélas mettre pleinement à profit leur potentiel d’économie que dans le trafic urbain. Dans ces conditions, le moteur essence est coupé pendant les phases d’arrêt prolongées et la batterie est rechargée pendant les nombreux freinages. Cette énergie récupérée est ainsi réutilisée lors des démarrages. Sur autoroute, l’assistance du moteur électrique n’est en revanche que rarement nécessaire, excepté lors d’un dépassement. À allure constante, les moteurs thermiques modernes sont toutefois devenus si économiques à l’heure actuelle que l’hybride ne peut plus guère diminuer leur consommation. Au contraire, 75 kg supplémentaires doivent être déplacés par rapport à la S350 de base, soit le poids du module hybride.
Avec une routière classique comme la Classe S, il sera par conséquent difficile de respecter la consommation calculée selon le cycle UE, qui comprend une fraction élevée de trafic urbain, de 7,9 litres seulement aux 100 kilomètres. Avec un diesel moderne et une gestion intelligente de l’énergie, ce chiffre peut par contre être atteint relativement facilement. Ainsi, BMW annonce une consommation moyenne ne dépassant pas 7,2 litres pour la nouvelle 730d, ce qui correspond pour un diesel à une émission de CO2 de 192 grammes au kilomètre. De son côté, Mercedes affiche 190 grammes pour la S400, soit une différence insignifiante malgré un investissement technique considérable. Alors, pourquoi ne pas associer diesel et hybride? En tout cas, les concepteurs se sont eux aussi posé la question, pour aboutir à la réponse qu’un tel modèle devrait arriver « prochainement ».
La Classe S la plus économique
Arrêtons cependant de tout critiquer. En admettant que la S400 BlueHybrid réalise bel et bien la consommation évoquée, elle bat la S350 de 272 CV de pas moins de 2,2 litres. Même le modèle diesel comparable du catalogue Mercedes, la S320 CDI de 235 CV, consomme davantage que l’hybride, avec quelque neuf litres. De surcroît, la Benz se contente pratiquement de la moitié de la consommation ingurgitée par ses rivales japonaises, ce qui suscite une fierté particulière à Stuttgart. Et ce bien que Lexus propose une berline entièrement hybride, qui à faible allure, peut rouler uniquement à l’électricité. Il convient néanmoins de préciser, pour que l’honneur du Japon soit sauf, que la LS 600h est dotée d’un huit cylindres, qui en conjonction avec le groupe électrique, déploie 445 CV (informations complémentaires), et que sa transmission intégrale augmente également la consommation. Quant à savoir si une telle puissance est nécessaire, c’est un autre débat.
De plus, les ingénieurs allemands ont quelque peu copié les Japonais: à l’instar des hybrides Toyota et Lexus, la Mercedes comporte également une information graphique complémentaire. La déclinaison hybride de la Classe S affiche dans son cadran combiné un schéma qui fait apparaître les flux d’énergie entre la batterie, le moteur électrique et le moteur essence. Outre l’esthétique, il en résulte un effet psychologique extrêmement positif. Effectivement, rares sont ceux qui n’aiment pas observer à quel point l’énergie retourne dans la batterie, tandis que le flux inverse fait froid dans le dos. En conséquence, bon nombre de conducteurs adaptent intuitivement leur style de conduite, ce qui constitue également un facteur décisif pour la baisse de la consommation dans une hybride.
En bref
Avec la S400 BlueHybrid, Mercedes pose un jalon et prouve la capacité des constructeurs allemands à proposer à leur tour un entraînement hybride. Tous les spécialistes s’accordent à dire que le moteur électrique supplémentaire n’est pas une panacée, mais il représente un pas pour la réduction, ou même la suppression totale, des émissions liées à l’automobile. Dans le futur, Mercedes mettra chaque année sur le marché un nouveau modèle hybride et allégera ainsi progressivement les émissions de CO2 de sa flotte. Enfin, lorsque la technologie hybride sera pour la première fois installée dans une citadine typique telle que la Classe A, elle pourra recueillir tous les fruits du potentiel d’économie inhérent à son principe.