À l’aube de son 55e printemps, elle n’a rien perdu de son pouvoir de fascination, bien au contraire: avec le tout dernier millésime 2008, en marge de tout le charisme qu’elle dégage, on peut aussi rouler sacrément vite.
Les arguments qui plaident pour l’achat d’une Corvette sont nombreux: le prix d’entrée de 65.850 euros, les 437 CV et l’image encore quelque peu « rebelle » ne sont qu’un bref échantillon des incitants à l’achat. L’Américaine doit principalement sa renommée à sa clientèle, qui jusqu’à présent se composait dans une proportion surprenante de marchands d’occasions peu sérieux, d’arrangeurs de combats de boxe et de souteneurs. Mais les temps changent. Les amateurs à la recherche d’une sportive relativement « avantageuse », offrant une puissance considérable et une cylindrée encore beaucoup plus mirobolante, ne peuvent ignorer la Corvette. En 2008, quelques modifications font leur apparition.
Rien de bien neuf
En apparence, la « nouvelle » Corvette ne présente guère de réelle nouveauté. Les jantes redessinées de teinte « competition gray », qui coûtent malgré tout 790 euros supplémentaires, constituent l’unique signe distinctif. Vraiment dommage! Elle aurait à tout le moins pu être parée de feux arrière modernes à LED.
L’habitacle révèle par contre certaines innovations. Le tableau de bord, par exemple, qui, en option, peut être entièrement garni de cuir. Ce matériau animal confère à l’ambiance intérieure une allure sensiblement plus raffinée et durable. À défaut, le plastique généralement médiocre des modèles précédents cède tout de même la place à des matériaux synthétiques corrects. L’on aimerait encore ici et là un degré de finition supplémentaire, mais la perfection n’est pas de ce monde.
Les dimensions sont restées inchangées. Un conducteur mesurant 1,93 mètre se sent extrêmement à l’étroit; la liberté de mouvement est fortement limitée, surtout dans le haut. Cela s’explique par la position plutôt haute imposée par les sièges en cuir partiellement électriques. Les dossiers des sièges, qui ne peuvent être bloqués dans un angle suffisamment droit, et la retenue latérale déficiente de l’assise trop molle sont également inhabituels pour une authentique sportive. L’appui lombaire et les faces latérales s’adaptent néanmoins électriquement aux exigences du conducteur. Le volant peut également être ajusté en hauteur et en profondeur, mais l’amplitude de réglage est insuffisante.
Une particularité plaisante réside dans le toit Targa en plexiglas teinté en bleu à l’intérieur. Il coûte 1.050 euros de plus que son équivalent non transparent, mais il les vaut largement. Nous ne le reléguons pas moins rapidement dans l’emplacement spécial prévu dans le coffre pour bénéficier d’un espace illimité à la tête. Et puisque l’on parle du coffre, pas moins de 634 litres s’engouffrent sous la lunette arrière- un record dans le segment sportif.
Nouveauté: le 6,2 litres
Après qu’une position d’assise acceptable a été trouvée, une pression sur un bouton suffit à démarrer le « small block »: c’est le surnom du moteur 6,2 litres V8, gonflé précisément de 200 cm³. En un éclair, le 2 soupapes par cylindre en aluminium est prêt à bondir.
Sur la route de Marseille au Castellet, en direction de l’ancien circuit de Formule 1 Paul Ricard, le V8 s’annonce par un grondement sonore dans le mode « D » de la nouvelle boîte automatique à six rapports. Les 440 CV de puissance ne sont même pas encore sollicités. En France, l’on ne peut en effet pas dépasser 90 km/h sur les routes nationales, un rythme de croisière que la Corvette pourrait atteindre en 4 secondes. En exploitant à fond les 6 rapports jusqu’au limiteur, à un régime modéré de 6500 tours, le compteur affiche les 100 km/h après 4,6 secondes à peine (commutateur: 4,4). D’après Corvette, la vitesse maximale culmine à 306 km/h et le couple s’élève à 585 newtons-mètres, soit 39 unités au-dessus de l’ancien modèle. Dans un premier temps, nous nous baladons tranquillement et la consommation oscille ainsi selon les indications du constructeur aux alentours de 12 litres.
Révélation sur la piste
Après quelque 80 kilomètres de trajet et des accrochages répétés du tablier avant, agencé dans une position basse, sur les routes de campagne françaises, nous arrivons au circuit Paul Ricard, où le paysage est tout autre. Seule une boîte manuelle à six rapports est disponible pour la course. La transmission a été remaniée en profondeur par rapport à l’édition précédente: les rapports sont raccourcis, la précision aiguisée et l’effort requis allégé. Le tout aboutit à un effet remarquable à la conduite. Les rapports s’enclenchent correctement et les débattements sont suffisamment courts.
Ressorts à lames à l’arrière
Dans le même registre, l’on peut remarquer à propos du châssis qu’il utilise encore des ressorts à lames à l’ancienne sur l’essieu arrière. Il peut néanmoins se montrer parfaitement convaincant dans son comportement routier. Il est nécessairement rigide, mais pas indûment dur. En option, il y a une régulation électronique des amortisseurs comportant deux modes. Dans les courbes négociées à vive allure, la Corvette reste très longtemps neutre. Un bref coup d’accélérateur la fait tourner délicatement. Sa réaction peut être maîtrisée aisément et procure un plaisir qui donne le tournis. Une pression ferme sur la pédale suscite un dérapage majestueux quel que soit l’angle de virage ou presque. Et ce malgré les pneus costauds de cote 285/35 R19 à l’arrière.
La grande surface de contact des pneus au sol est doublement mise à profit sur le circuit. D’une part, la motricité est excellente, et de l’autre, les accélérations transversales qui peuvent être atteintes sont colossales. Un pilote réellement détendu pourra même consulter la valeur d’accélération transversale précise en «g» dans l’affichage frontal pendant le passage en courbe. Ce chiffre est en effet projeté sur le pare-brise à côté de la vitesse du moment.
Selon une technique peu répandue dans cette catégorie, les disques de freins ventilés de la Corvette poids plume de 1450 kg sont montés dans des étriers Faust. Leur force de serrage est extrêmement puissante en permanence et leur résistance n’a jamais été prise en défaut dans notre conduite relativement sportive. Seul le dosage pourrait être plus précis.
Direction remaniée
La direction remaniée, avec un arbre de direction plus rigide et un rapport de démultiplication modifié, permet de tracer la trajectoire idéale. Bien sûr, elle n’est pas aussi sensible que la direction d’une Porsche 911. Mais il ne faudrait pas oublier le prix! Pour moins de 70.000 euros, cette sportive pur jus recèle de gigantesques réserves de puissance. Et pour ma part, il ne fait rapidement aucun doute que la Corvette a bien plus de capacités que l’actuel occupant de son siège conducteur. Sur la piste, les 8 chambres de combustion ont du reste englouti 22,5 litres de super, tandis qu’une Audi RS6 a nécessité 39,8 litres pour un style de conduite similaire sur le même parcours.
Une bonne affaire sur le marché sportif
La Corvette est une bonne affaire sur le marché des bolides sportifs. De surcroît, une série spéciale à moins de 60.000 euros devrait sortir prochainement. Les options intéressantes sur le modèle de série sont la peinture métallisée, le toit solaire bleu, les jantes en aluminium sombres, et éventuellement, la boîte automatique à six rapports. L’on peut en revanche faire l’économie du système de navigation: la plupart des appareils portables s’acquittent mieux de leur office et ne coûtent qu’un bon dixième de son prix.
En bref
Depuis maintenant 55 ans, Corvette exerce un large pouvoir de séduction, notamment parmi les personnalités louches. Le modèle 2008 surpasse en tous points ses prédécesseurs. Il est devenu, grâce à un surplus de puissance et de couple, ainsi qu’à certaines transformations dans la direction, le châssis et la transmission, un formidable véhicule de sport. Il attire, il est sexy et il a une sonorité électrisante. Son prix est fixé à bon escient. La mise en œuvre est aujourd’hui satisfaisante et l’image tout à fait convenable.